top of page
Pascale Régnault

L'huile de palme raffinée, faut-il la diaboliser ?



Quand je suis arrivée au Cameroun, j'ai été impressionnée (de façon négative malheureusement), par la quantité d'huile de palme utilisée ici. Dans la plupart des cuisines camerounaises, on ne trouve que de l'huile de palme, aucune autre huile n'est utilisée, et c'est surtout la quantité utilisée pour chaque plat cuisiné qui m'a frappée.

En tant qu'occidentale, j'ai entendu beaucoup de mal au sujet de l'huile de palme, mais finalement, qu'y a t-il de vrai dans toutes ces rumeurs?


Il y a eu de nombreuses études sur les effets de cette huile sur la santé, et quelques polémiques sur le sérieux de ces études, j'ai donc essayé de trier un peu tout ça.

Trois articles ont surtout retenu mon attention pour y voir plus clair :

- « L’huile De Palme », du docteur J.-M. Lecerf, publié en juin 2017 dans la revue Médecine des maladies métaboliques

- « Palm oil and cardiovascular health: considerations to evaluate the literature critically », de Eva Gesteiro, 2018 (1)

- « Effects of oils and solid fats on blood lipids: a systematic review and network meta-analysis », de Lukas Schwingshackl, 2018. (2)


Pour comprendre de quoi on parle, j'ai commencé par chercher la composition de l'huile de palme dans la table de composition nutritionnelle des aliments (ciqual.anses.fr).

Huile

De palme raffinée

De soja

D'arachide

D'olive

Lipides

100 %

100 %

99,9 %

99,9 %

Acides gras saturés

49,3 %

14,7 %

16,2 %

15,2 %

Acides gras monoinsaturés

37 %

22,1 %

64,2 %

73,1 %

​Acides gras polyinsaturés (=acides gras indispensables)

9,3 %

59,1 %

15,1 %

7,17 %

D'après ciqual.anses.fr, la table de composition des aliments utilisée par les nutritionnistes

Composition de quelques huiles faciles à trouver au Cameroun


100% de lipides, dont 49,3 % d'acides gras saturés et seulement 9 % de polyinsaturés.

Pour l'huile rouge (huile de palme non raffinée), il faut ajouter une bonne dose de caroténoïdes (précurseur de la vitamine A) et de tocotriénol (précurseur de la vitamine E), mais ces deux nutriments indispensables ne sont plus présents dans l'huile de palme raffinée.

En comparaison, l'huile de soja compte seulement 14,7 % d'acides gras saturés et 59 % de polyinsaturés (les fameux oméga 3 et oméga 6).


Des études ont démontré qu'une consommation importante d'acides gras saturés augmentait fortement les risques de maladies cardiovasculaires, aussi l'huile de palme a longtemps été pointée du doigt. Mais, même si elle contient prêt de 50% de ces acides gras saturés, d'après J.-M. Lecerf, médecin chef du service nutrition à l'Institut Pasteur de Lille, les effets de l'huile de palme dépendent, avant tout, du régime alimentaire global.

La règle « numéro un » en nutrition s'applique ici : de tout en quantité raisonnable, reste à apprendre ce qu'est une quantité raisonnable.

Pour une alimentation saine, pas besoin de bannir l'huile de palme, surtout pas l'huile rouge qui est une source non négligeable de vitamine A (la carence en vitamine A est la première cause de cécité en Afrique), mais il est important de diversifier sa consommation de matières grasses car les huiles sont toutes différentes. Elles sont complémentaires de part leur composition, propriétés, et utilisations.

Par exemple, même si l'huile de soja est une bonne source d'acides gras insaturés, il ne faut pas l'utiliser pour faire de la friture, car elle s'oxyde à haute température. Dans ce cas, préférez lui l'huile d'arachide !


Reste le problème de la quantité d'huile de palme utilisée pour cuisiner. Quelque soit la matière grasse consommée, les lipides restent le plus fort apport énergétique de notre alimentation (100g de lipide apporte 900 calories, alors que 100 grammes de glucide apportent 400 calories). Et là, même après plusieurs années au Cameroun, chaque fois que je regarde un(e) camerounais(e) cuisiner, j'ouvre de grands yeux ronds ! Quel intérêt à utiliser autant d'huile de cuisson ? Je vous rappelle que toute calorie qui n'est pas dépensée est stockée sous forme de graisse, et que la graisse viscérale est la première cause du diabète de type 2 !

Il serait très raisonnable d'apprendre à diminuer la quantité d'huile utilisée pour cuisiner. Pour cela, deux conseils simples :

  • le 1er, achetez des casseroles avec un revêtement anti-adhésif,

  • le 2nd, ne versez pas l'huile directement de la bouteille à la casserole, passez par l'intermédiaire de la cuillère à soupe, et comptez combien vous en mettez dans la casserole. Deux cuillères sont largement suffisantes pour faire revenir votre viande.

Ce qui fait la réussite de votre plat, c'est les condiments (choix, quantité et qualité), ce n'est pas la quantité d'huile !


En conclusion, on a longtemps incriminé l'huile de palme à cause de sa forte concentration en acides gras saturés, qui pourraient augmenter les risques de maladies cardiovasculaires. Les médecins chercheurs, auteurs des articles les plus récents, penchent aujourd'hui vers un risque de maladies cardiovasculaires seulement si l'on abuse de l'huile de palme. Il est donc important de diversifier les huiles utilisées dans la cuisine. Vous pouvez par exemple faire votre vinaigrette à l'huile de soja et votre friture à l'huile d'arachide.

Et comptez le nombre de cuillères d'huile consommées par jour ! L'obésité, les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2 peuvent vraiment vous gâcher la vie, ça vaut la peine d'apprendre à être raisonnable !





Pascale Régnault


spécialiste des questions concernant le rapport entre la nourriture et la santé



 

Posts récents

Voir tout

Comments


bottom of page